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Patiala House


Bande originale

Laung Da Lashkara
Kyun Main Jagoon
Rola Pe Gaya
Aadat Hai Woh
Baby When You Talk To Me
Tumba Tumba
Aval Allah
Kyun Main Jagoon (Remix)
Role Pe Gaya (Remix)
Baby When You Talk To Me (Remix)
Laung Da Lashkara (Remix)

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La critique de Fantastikindia

Par Mel - le 18 septembre 2012

Note :
(8/10)

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En 1979 à Southall dans la banlieue de Londres, Gurtej Singh Kahlon (Rishi Kapoor) s’est mué en activiste infatigable de la communauté sikh à la suite d’un meurtre raciste. Ce qui était au début une dénonciation de la haine de quelques skinheads, s’est transformé au fil des années en repli communautaire, puis en rancœur revancharde envers les anglais. Bauji, comme tout le monde l’appelle à Southall, règne maintenant, 30 ans plus tard, en patriarche incontesté de cette famille très élargie où on peut dire : "C’était comme si Southall n’était pas une partie de l’Angleterre, mais un village du Penjab".

Son fils aîné, Parghat, surnommé Gattu (Akshay Kumar), était un joueur de cricket universitaire très talentueux, promis aux sélections en équipe nationale. Mais Bauji ne pouvait envisager qu’il joue pour l’Angleterre, et il lui interdit de participer au test match contre l’Australie. C’était la fin prématurée de sa carrière. Il se retrouve alors à 34 ans à gérer la petite épicerie de quartier que son père avait prévue pour lui. Mais tous les soirs, seul, à la nuit tombée, il va lancer des balles contre des adversaires imaginaires en ressassant tristement son passé glorieux.

Un jour qu’il est à se morfondre seul à son comptoir, il fait la connaissance de la pétillante Simran (Anushka Sharma). Peut-être par goût pour les causes perdues ou à cause de son air de chien battu, elle entre dans sa vie et lui fait une cour assidue. Dans le même temps, la sélection nationale anglaise de cricket vit une crise grave : l’équipe entière doit être remplacée. Un vieux sélectionneur pense alors à Gattu qui n’a pourtant plus joué depuis bien longtemps. Simran, mais aussi ses frères et sœurs eux-mêmes contraints à abandonner leurs rêves sur l’autel des décisions irrévocables de Bauji, le poussent à tenter cette nouvelle chance qui lui est offerte…

Patiala House est le quatrième film de Nikhil Advani qui a commencé sa carrière comme assistant de Karan Johar sur Kuch Kuch Hota Hai et Kabhi Khushi Kabhie Gham. Puis, toujours sous la bannière de Karan Johar, il a dirigé son premier film, Kal Ho Naa Ho. Il s’agissait déjà d’une histoire de NRI (Non-Resident Indians) qui contenait en germe le style visuel caractéristique de Nikhil Advani fait d’images claires et propres, d’accélérations du temps, d’incrustations humoristiques et d’écrans splittés. Mais alors que Kal Ho Naa Ho s’étirait en longueur avec un Aman qui n’en finissait pas de mourir, la narration de Patiala House est beaucoup plus équilibrée. C’est un film grave avec aussi des moments plus légers. Le rythme général est plutôt lent mais il sait devenir nerveux lorsque c’est nécessaire.

C’est le cas des scènes de cricket [1] qui rendent passionnant ce sport un peu obscur pour un spectateur français. Les quelques phases de jeu présentées sont très réalistes et remarquablement montées. L’utilisation de joueurs professionnels comme Andrew Symonds y est certainement pour beaucoup. C’est à en faire regretter de ne pas en voir plus souvent.

Comme dans Chak De ! India, la finale se joue contre l’Australie. Ici non plus l’issue ne fait pas beaucoup de doute, même si la tension arrive à la fin à son comble. Mais victoire ou défaite, ce n’est finalement pas très important dans Patiala House, le cricket n’est qu’une toile de fond, un décor.

Le film traite principalement de la relation entre un père et son fils. Rishi Kapoor est impérial dans le rôle du patriarche dominateur, et Akshay Kumar déchirant dans celui du fils qui ne peut pas aller contre la volonté de son père. Les deux personnages sont tout deux particulièrement sobres et justes. Ils ont si peu de dialogues entres eux qu’on pourrait se prendre à douter qu’ils puissent communiquer. En fait, tout passe par des regards très explicites où chacun connaît très exactement la position de l’autre. Cette relation n’est pas ouvertement conflictuelle : Gattu a accepté la décision de Bauji. Au contraire de Jess qui cherche par tous les moyens à contourner celle de ses parents dans Joue-la comme Beckham, Gattu se contente de ruminer sa tristesse. Tout change lorsque Simran et toute la maisonnée l’incitent à prendre le flambeau contre Bauji, c’est à dire en réalité à assumer sa position de fils aîné.

Bauji a menacé de se suicider si Gattu persistait à vouloir jouer pour l’Angleterre ; alors intégrer l’équipe serait tuer son père. On pourrait voir du mythe d’Œdipe à deux francs dans l’évocation que l’affirmation du fils passe par la mort du père. Mais on peut tout autant estimer que cette histoire de suicide n’est rien d’autre qu’une grosse ficelle scénaristique destinée à mettre en place la situation en un tour de main. Quelle que soit l’interprétation, dans ce jeu de dupes fait de non-dits et qui remonte à la nuit des temps, Gattu doit "simplement" s’affirmer comme un adulte pour que son père l’accepte comme tel. Mais Dieu que c’est difficile !

Un de ces patriarches qui avait vu Kabhi Khushi Kabhie Gham a fait un jour cette réflexion : « Le film est intéressant et très émouvant, mais totalement invraisemblable. Il est impensable que le père pleure devant son fils et qu’il lui demande pardon. Tout comme on ne peut pas imaginer que le fils aîné supplie son père à genoux ».

En ne tombant pas dans ce travers, Patiala House est dans la vérité comme rarement au cinéma.

Il l’est également lorsqu’il aborde le sujet de l’immigration. A son père qui lui interdit de jouer dans l’équipe d’Angleterre, Gattu répond : « Mais je ne peux pas jouer pour l’Inde. L’Inde ne me le permettra pas. Je suis citoyen britannique, papa ». Bauji refuse de comprendre et fait semblant d’ignorer que lui et son fils n’ont en fait pas la même nationalité, que leurs mondes s’éloignent inexorablement. Il réagit violemment comme le père de Jazz dans Namastey London. Alors que ce dernier se trouve conforté dans ses certitudes archaïques au prix d’un final ridicule, Patiala House prend à la fin un parti nettement plus intense et émouvant. On comprend sans qu’un seul mot soit prononcé que Bauji a rendu les armes.

Tout comme le père de Jess dans Joue-la comme Beckham, Bauji est terrifié par le rejet qu’il pressent de la part des Anglais ; peut-être parce qu’il considère que son fils est indien, un étranger. On est dans la magie de Bollywood, alors bien sûr, cela ne peut pas arriver. Mais Monty Panesar, joueur vedette de l’équipe d’Angleterre de cricket, sikh d’origine penjabi, a montré que la réalité arrive parfois au niveau de la fiction ; ou au contraire que la fiction rejoint la réalité.

Les Anglais sont présentés ici sans caricature, mais en faisant le grand écart. On va des skinheads ignobles lors des émeutes raciales à Southall aux policiers sympas qui escortent Bauji et sa famille. Cette dernière, fort nombreuse, peuple le monde de Bauji et de Gattu. Il est difficile de s’y attacher et ces différents membres sont assez transparents. Même Dimple Kapadia qui reforme pourtant avec Rishi Kapoor le couple mythique de Bobby ne parvient pas à asseoir sa présence. Les habitants de la "Patiala House" apportent surtout une touche de comédie bienvenue dans ce qui aurait pu être autrement un film pesant.

La musique est très présente dans Patiala House. Elle ne reste malheureusement pas très longtemps dans l’oreille si ce n’est la chanson chorégraphiée qui termine le film, Laung Da Lashkara Patiala House. Son ouverture par Dimple Kapadia est charmante et le sourire d’Anushka Sharma fait plaisir à voir. Mais comme dans Rola Pe Gayale, les parties de "rap" de Hard Kaur qui joue la sœur de Simran, font sourire tellement son style (pardon, son "staïle") est décalé et gentillet par rapport à ce qu’on peut attendre d’un rap aujourd’hui. Le film contient également une belle ballade triste, Baby When You Talk To Me, qui a un côté "variété internationale" prononcé mais qui se laisse écouter sans déplaisir.

Nikhil Advani a réussi un film étonnant où Akshay Kumar campe un personnage sobre aux antipodes de ses rôles habituels. Le thème récurrent à Bollywood du modèle patriarcal et de la relation père-fils, est traité ici avec une intensité et une vérité qui vont bien au-delà de ce qui est à donner à voir dans les mélodrames traditionnels.

Malgré des détours par la comédie et son côté larger than life, Patiala House transpercera le cœur de tous ceux, innombrables, qui ont eu à vivre cette relation familiale compliquée et parfois infiniment douloureuse.




[1] Gattu est un fast bowler, c’est à dire un lanceur qui propulse la balle à très grande vitesse. Si ça ne vous dit rien, c’est peut-être que quelques mots d’explication sur les règles du cricket ne sont pas superflus. Elles sont particulièrement compliquées, aussi on se limitera ici au strict nécessaire pour comprendre les actions de jeu présentées dans le film.

Deux équipes s’affrontent sur un grand terrain en gazon au milieu duquel se trouve une zone rectangulaire. A son extrémité, se trouve une petite construction de bois faite de trois bâtons surmontés de petits tasseaux en équilibre, le guichet. Au cours d’une manche, une équipe est au lancer de la balle cherchant à détruire le guichet. Un lanceur est désigné pour six tentatives, les dix autres joueurs sont positionnés sur le terrain prêts à rattraper la balle si elle est renvoyée. L’autre équipe fournit un batteur qui va protéger le guichet en la relançant à l’aide de sa batte aplatie. L’objectif du lanceur est d’éliminer le batteur, celui du batteur de marquer des points.

Si le lanceur arrive à détruire le guichet, le batteur est éliminé. C’est aussi le cas si la balle renvoyée par le batteur est rattrapée sans avoir préalablement touché le sol. Mais si le batteur parvient à la relancer et qu’elle touche le sol, idéalement même qu’il la fasse sortir du terrain, alors il peut marquer des points en effectuant des courses pendant que les coéquipiers du lanceur la ramènent au guichet. Il doit cependant être vigilant car si le dernier joueur qui ramène la balle détruit le guichet avec la main alors qu’il est encore en train de courir, il est également éliminé. La manche s’arrête après avoir éliminé dix des onze batteurs, et on passe à la suivante en inversant les rôles. Cela peut prendre beaucoup de temps, aussi les matchs sont limités en durée, par exemple à environ 3 h comme dans la compétition T20 présentée dans le film.

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