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Laawaris

Traduction : L’Orphelin

Bande originale

Mere Angne Mein (Female)
Mere Angne Mein (Male)
Jiska Koi Nahin
Kab Ke Bichhde Hue
Kahe Paise Pe
Apni To Jaise Taise
Jiska Koi Nahin (II)

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La critique de Fantastikindia

Par Maya - le 21 septembre 2006

Note :
(9/10)

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Amitabh Bachchan, dans un de ses plus beaux rôles d’« angry young man », se bat pour exister au-delà de son statut d’orphelin (laawaris), en quête de reconnaissance, rejetant la fatalité et l’injustice. Laawaris est un superbe film qui met les fondamentaux de Bollywood sous les projecteurs sans fard de la lutte sociale.

Témoin encombrant, Hira est vendu à sa naissance à un homme qui a pour seule mission de l’éloigner et de lui taire ses origines. Alcoolique, celui-ci n’accorde jamais la moindre attention à l’enfant qui grandit dans le plus grand dénuement. Devenu un adulte fier, fruste et n’ayant d’autre loi que la sienne, Hira (Amitabh Bachchan) découvre que cet homme n’est pas son père. Cette nouvelle à la fois le libère de ce véritable boulet et le plonge dans une sorte d’abysse sans fond : lui qui n’était déjà pas grand-chose, n’est plus rien, rien qu’un être abandonné, délaissé : laawaris. Il faut entendre le ton infiniment méprisant qu’il utilise pour ce mot, il pourrait dire « déchet de l’humanité » avec plus d’entrain (quel acteur !).

Evidemment, Bollywood faisant bien les choses, Hira se retrouve face à son véritable père (Amjad Khan) trois scènes plus tard. Mais si le spectateur le sait, père et fils ont une longue route à faire pour se retrouver.
Et cette route est passionnante, car jamais le film ne cède à la facilité, chaque détour est une pièce du puzzle, riche en péripéties, on ne s’ennuie pas un instant. D’autant plus que cette histoire de paternité, si elle donne une force symbolique essentielle à Laawaris, n’en constitue pas l’unique thème. L’injustice sociale est au cœur du film, et s’incarne notamment dans la vie fragile d’un frère et d’une sœur, tous deux potiers, qu’Hira devra prendre sous sa protection pour les soustraire à l’odieux fils du propriétaire (Ranjeet).

On sent que le réalisateur et producteur, Prakash Mehra (également réalisateur de Zanjeer), s’est particulièrement investi dans ce film, utilisant pleinement le talent d’Amitabh pour exprimer sa propre colère, sa propre honte de voir son pays abandonner les plus faibles de ses citoyens aux mains des tyrans locaux. Pour les amateurs de « dishun », les scènes de bagarre sont nombreuses, à la fois bien intégrées et bien mises en valeur, non sans humour parfois. Et je dois dire que même pour les non amateurs (trices) de « baston », la rage d’Amitabh est communicatrice…

Hira signifie diamant. Grossier caillou au début, il révèlera avec les événements l’éclat et la pureté de son cœur, mais aussi ses aspects tranchants, qu’aucune lame ne peut entamer, ni le mal, ni la lâcheté, ni la corruption, ni même l’amour ! La pauvre Zeenat Aman en est réduite au rôle de faire-valoir. Pourtant, elle est le lien social de l’histoire, le pont entre richesse et pauvreté, entre passé et avenir ; elle sait voir l’éclat du diamant sous sa gangue, mais lui, même s’il l’aime, ne se sent tout simplement pas le droit d’exister, alors construire un avenir avec elle…

On peut voir dans ce jeune homme en colère l’expression de l’Inde des années 80, en révolte contre l’état oppresseur, la corruption, la déliquescence morale d’une certaine « élite ». Hira est splendide dans son insoumission, sa révolte permanente et courageuse, son indépendance, alors qu’il pourrait se laisser séduire par l’argent facilement gagné et l’affection que lui témoigne son riche employeur.

On peut voir aussi dans Laawaris l’appel au secours de l’homme coupé de ses racines, qui ne peut aimer, qui ne peut se reposer, qui ne peut sourire, qui ne peut rien construire tant que ses racines ne lui sont pas connues et ne sont pas reconnues par la société.
Si le film indien met l’emphase sur la reconnaissance par le père, et la reconnaissance de cette parternité par la société, ce thème et la façon de le traiter dans Laawaris sont aussi universels qu’actuels : Paris est entouré de jeunes hommes en colère coupés de leurs racines, en mal de reconnaissance, dont on comprend difficilement la violence, qui ne peuvent peut-être rien construire tant que leurs racines ne sont pas acceptées, par eux et par la société.
De la même façon, Laawaris, même si le thème fondamental est différent, a de nombreux points communs avec 8 Mile et son héros Eminem : un parent seul et alcoolique, une enfance difficile et sans repère, un environnement hostile, une tendance à faire la loi en refusant de subir celle de la société, le refus de la facilité, une volonté agressive et brute, une atmosphère de violence…

D’un point de vue musical, sans avoir la créativité « bousculante » de son jeune frère made in USA, Laawaris recèle quelques bons moments assez éclectiques : une poignante chanson sur le destin Jiska koi nahin qui revient à intervalle régulier jalonner le parcours de Hira ; Mere Aangane Mein jouée par Rakhee Gulzar qui incarne la mère de Hira, puis reprise par Amitabh Bachchan qui interprète avec délectation et drôlerie plusieurs personnages de femmes tout en réussissant à ne pas dénaturer cette chanson. Et puis Aapke kya hoga, qui n’a musicalement rien de transcendant, mais qui transpose de façon assez amusante le salon de danse traditionnel dans l’univers disco miroitant des années 80.

Si les décors et des costumes sont très « eighties » (ah, les petits blousons d’Amitabh ! les Ray Ban de Ranjeet !), Laawaris est résolument intemporel, il porte la profondeur des films de l’âge d’or et les colères d’aujourd’hui : un grand classique Bollywood !
Et Amitabh Bachchan est décidément l’acteur du siècle.

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