Entretien exclusif avec Anushka Shetty
Publié vendredi 1er avril 2016
Dernière modification lundi 4 avril 2016
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Début août 2015, nous avons eu l’immense privilège d’assister au tournage du remake tamoul/telugu du succès français Intouchables, grâce à la gentillesse de Barbara Breheret, productrice exécutive. Ce film, titré Thozha en tamoul et Oopiri en telugu, réunit un casting bilingue de prestige..
C’était un secret, maintenant nous pouvons vous le dire, Anushka fait un caméo dans ce film. Arrivée le jeudi matin à Lyon, elle en est repartie le samedi, le temps de tourner ses scènes. L’actrice enchaîne les gros projets et s’est posée pour discuter avec nous un soir sur une terrasse de la Place des Terreaux.
Avant toute chose, félicitations pour l’énorme succès de Baahubali.
Anushka : Merci beaucoup, j’en suis très fière… Devasena, le personnage que je joue, a plusieurs nuances. Dans la première partie nous n’apercevons qu’une petite partie de ce qu’elle est vraiment, mais vous avez pu voir que beaucoup de choses sont à creuser pour son personnage.
Saviez-vous que les producteurs indiens veulent le sortir officiellement en France ?
Anushka : Oui, je pense sincèrement qu’ils devraient le faire, ce film n’a pas de barrière géographique vous savez. Rajamouli (le réalisateur de Baahubali, ndlr) a fait un excellent travail sur les personnages, évidemment sur celui de Baahubali joué par Prabhas, mais il y a des personnages secondaires incroyables comme Sivagami jouée par la grande Ramya Krishnan, Kattapa par Satyaraj, Nasser… le casting est très très fort, les émotions sont puissantes et permettront aux gens de différentes cultures de s’y attacher.
Quand vous l’avez tourné, avez-vous pensé que ce serait un tel succès ?
Anushka : Evidemment on souhaite toujours que nos films soient de gros succès, mais au final on n’y pense jamais au moment du tournage. Mais on n’aurait jamais espéré qu’il arrive là où il est en ce moment, qu’il ait battu tous les records que ce soit en Inde ou ailleurs.
Tout ce que je peux dire c’est que nous avions foi en ce scénario, on était très confiants dans le résultat que ça pouvait donner avec quelqu’un comme Rajamouli aux commandes. J’ai déjà travaillé avec lui, c’est ma seconde expérience à ses côtés [1] et c’était un plaisir incroyable de le retrouver, de s’amuser avec lui. C’était très intéressant de jouer dans des studios avec des fonds verts pour faire vivre sa vision.
Vous avez tourné plusieurs fois avec Prabhas et il se trouve qu’il y a vraiment une alchimie à l’écran entre vous.
Anushka : Oui, c’est mon troisième film avec lui. Merci, merci pour le compliment. Et bien avant toute chose, il y a beaucoup de confiance et d’aisance entre nous parce que nous sommes amis depuis très longtemps, bien avant de tourner ensemble. Au-delà de notre amitié, c’est un professionnel très agréable, qui sait mettre à l’aise ses partenaires. Mais je dois avouer que pour Baahubali, c’était comme une grande famille avec tous les acteurs, tout le monde s’entraidait, tout le monde faisait tout pour que les autres soient les meilleurs, c’est une ambiance tellement agréable, propice à la création. Il y a beaucoup de scènes de combats à l’épée, et Prabhas était toujours là pour nous aider, Tammanah ou moi, à nous améliorer. Je suis impatiente de le retrouver pour filmer la seconde partie en tout cas !
Vous avez travaillé sur Rudramadevi, un autre film épique, peut on parler d’effet de mode ?
Anushka : Et bien Rudramadevi est un cas un peu à part, c’est un film historique en fait, c’est une partie de l’histoire d’Andhra Pradesh que l’on raconte ici. Ce qui est assez émouvant c’est la volonté du réalisateur de mettre en image la vie incroyable de Rudramadevi. Il l’a lu dans les livres d’histoire quand il était enfant et depuis, c’était plus qu’un rêve, une obsession d’amener cette partie de l’histoire aux spectateurs. Je suis extrêmement fière de faire partie de cette aventure. Peu de gens au final connaissent vraiment l’histoire de l’État dans lequel ils vivent, et notre volonté première c’est d’intéresser les enfants et les jeunes, leur montrer que la construction de notre pays a été jalonnée de petites histoires extraordinaires. Et pour tenter de moderniser encore plus tout ça, le film a été tourné en 3D, une nouvelle technique pour nous…
Voilà dix ans cette année que vous avez commencé à jouer, vous avez réussi à faire évoluer votre image, du faire valoir glam aux rôles principaux avec des personnages forts et bien écrits.
Anushka : Oui, dix ans déjà ! Permettez-moi de vous dire que je suis touchée que vous ayez remarqué l’évolution de mes rôles.
S’ensuivent alors quelques minutes complètement fangirl pendant lesquels je lui explique que c’est l’une de mes actrices préférées, émotion des deux cotés de la table.
Anushka : C’est une aventure tellement incroyable. Quand j’ai commencé je n’étais pas du tout à l’aise dans le milieu du cinéma, et ça a été un voyage initiatique très intéressant toutes ces années. Je peux dire que c’est Arundhati qui a été un réel tournant dans ma carrière et je dois admettre que le réalisateur et le producteur, qui ont vu en moi un potentiel que personne n’avait jamais voulu exploiter jusqu’alors, ont changés ma vie. Les spectateurs m’ont vu différemment et ont accepté cette autre partie de moi.
Vous êtes énormément sollicitée dans le sud, comment faites-vous vos choix maintenant ?
Anushka : J’écoute [2] tous les scénarios que l’on me propose. J’adore les histoires et je me projette en tant que spectatrice quand un réalisateur ou un producteur viennent me voir. J’ai envie de raconter des choses qui plairont au public, et si en plus le visuel va avec le script, c’est du bonus.
Je ne crois pas vraiment aux films « d’héroïnes » ou de héros d’ailleurs. Si un scénario est bon, voilà le plus important, peu importe si le personnage principal est masculin ou féminin. Des personnages bien écrits, une histoire forte et un beau visuel, voilà ce qui me pousse à avancer. D’un autre côté, j’aime bien aussi m’amuser en tournant dans des films plus légers, type masalas. Je vais être honnête, ça me manque beaucoup. Ces quelques dernières années, j’ai été prises par Rudramadevi et Baahubali, donc j’espère vite resigner pour un projet plus « fun ».
Ceci dit, j’ai fait un autre film, très différent de tout ce que j’ai pu tourner jusqu’à maintenant, qui s’appelle Size Zero [3]. Un projet extrement intéressant. Le réalisateur a fait Anaganaga O deerudu, un film de fantasy, mais ce n’est pas le cas ici, c’est une comédie romantique, avec un vrai message social en fond. Je joue le rôle d’une femme obèse. Vous savez, aujourd’hui les gens sont obnubilés par l’apparence et le corps. Ils voient les actrices et les mannequins et rêvent de la même chose, ils ne voient pas l’envers du décor, que tout est photoshoppé ou arrangé pour le grand écran. C’est une petite histoire très charmante, je partage l’écran avec Arya.
Vous avez pris du poids pour ce rôle, y a-t-il eu des remarques à ce sujet ?
Anushka : J’ai pris 13 kg pour le film en effet, mais les tabloïds n’ont pas été si durs que ça avec moi, je pense qu’ils étaient juste inquiets pour ma santé, personne ne savait au début que c’était pour un rôle que j’ai pris autant de poids. Les gens étaient plutôt impressionnés par ma décision, certains m’ont mis en garde que prendre et perdre autant de poids en une période assez courte pouvait être un danger pour ma santé, mais c’était ce que je devais faire pour mon rôle. Je n’ai pas à me plaindre.
Vous reste-t-il des rêves à accomplir ?
Anushka : J’adorerais jouer dans un film français… Je ne suis pas une grande cinéphile, et pour tout vous dire, je ne savais pas du tout qu’il y avait une industrie du film en France jusqu’il y a encore quelques années… J’ai un peu honte de le dire, mais vraiment, je vivais dans mon monde, coupée de beaucoup de choses, concentrée sur le travail. Quand j’ai su ça, je me suis procurée plein de films français et me suis fait des marathons… Vous faites des films tellement fantastiques, vraiment ceux qui me touchent le plus avec les films iraniens.. J’ai vu Intouchables notamment, quelle histoire touchante, je suis honorée de faire partie de cette aventure pour amener ce bijou au public indien. Oh et puis j’adore l’actrice Audrey Tautou, j’ai vu tous ses films disponibles sur Itunes, je l’adore !
[1] Elle a joué dans Vikramarkadu.
[2] Il faut savoir qu’en Inde, les producteurs et/ou les réalisateurs vont rencontrer les acteurs pour leur raconter l’histoire du film en détails, il n’y a pas d’envoi de scripts.
[3] Inji Idhupazhagi - Taille de guêpe qui a été distribué en France par Night ED Films.
Merci à Brigitte et Gandhi Tata pour leur aide précieuse !